Demander, pour créer des relations authentiques et réciproques
Un TED talk fondamental
Plusieurs d’entre vous auront pensé que je parlerais ici du TED Talks de Don Pallotta : The way we think about charity is dead wrong. C’est vrai que ce TED est extrêmement pertinent, et j’invite tous ceux d’entre vous qui ne l’avez pas encore vu à y aller dès la fin de cette lecture. Il fera peut-être l’objet d’un autre Point de vue, mais ce n’est pas celui-ci.
Pour ceux qui n’avez pas encore découvert cette source d’information et de mobilisation de très grande qualité, j’espère que vous irez rapidement sur le lien ci-après pour découvrir le TED Talks dont je veux vous entretenir, par Amanda Palmer : The art of asking.
Travailler dans le secteur permet généralement de comprendre l’importance de demander. Les OBNL sont performants en grande partie parce qu’ils demandent de l’aide, en argent, en nature, en temps, en expertise…
Alors qu’on parlait souvent de «quêter» il y a quelques années encore, nous sommes nombreux à avoir modifié le vocabulaire associé à notre travail, parlant plutôt d’investissements sociaux, d’enrichissement collectif lorsque vient le temps de proposer un soutien majeur à un donateur.
The art of asking rappelle une vérité fondamentale, dont ont déjà fait mention Jacques T. Godbout dans son livre L’Esprit du don et Daniel Lapointe dans son manuel sur la collecte de fonds, La gestion philanthropique (page 32 et suivantes), et c’est le fait que toute demande de dons repose sur la relation, le lien. Demander, c’est proposer une relation à notre interlocuteur en se présentant devant lui avec l’admission de notre incapacité à réaliser seul le projet. Le donateur peut ou non accepter de façon libre et volontaire de nous aider. C’est la grande qualité de cette relation.
Ce qui est tellement bouleversant, à mon sens, dans la courte conférence d’Amanda Palmer, c’est sa description de la vulnérabilité essentielle dans laquelle se place le demandeur, puisqu’il s’ouvre sans connaître la réponse et accepte ainsi de prêter flan au refus. Encore plus bouleversant est le fait que l’expérience de vie de Madame Palmer lui a démontré que cette vulnérabilité, alors qu’elle s’est constamment mise à la merci de ses fans (c’est une chanteuse punk rock) pour manger et se loger, est une condition essentielle à l’établissement d’un réel réseau tissé par sa communauté dans une relation parfaitement authentique, réciproque et équitable. Un réseau dans lequel nous pouvons toujours avoir confiance, notre réseau.
Sans demande, sans vulnérabilité, pas de relations authentiques avec les autres. C’est parce que nous avons besoin les uns des autres pour réaliser nos projets, du plus petit au plus grand, que nous devons apprendre à demander à un niveau qui permette l’établissement de vraies relations avec nos donateurs.
Pour quelqu’un qui a passé les 49 premières années de sa vie convaincue que le fait d’avancer seule était une démonstration de solidité et de force, cette vidéo fût particulièrement ébranlante. Amanda Palmer démontre en moins de 15 minutes que la vraie force se trouve dans le courage de se mettre en état de vulnérabilité pour créer de vraies relations avec les autres.
La prochaine fois que j’entendrai un membre de conseil d’administration ou de comité me dire que la sollicitation le gêne, je serai mieux équipée pour l’inviter à réfléchir au fait que si la demande fait appel à une réponse réellement libre et volontaire, ne pas demander équivaut à priver le donateur potentiel de cette relation qui lui permettra de combler un réel besoin, dont il est seul à pouvoir évaluer l’ampleur et la valeur.
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